Les nouveaux locaux du centre d’addictologie du bassin d’Arcachon ont été inaugurés.
L’occasion de revenir sur le travail engagé depuis treize ans par cette structure.
SABINE MENET s.menet@sudouest.fr
Si son déménagement remonte au mois de mars, ce n’est que vendredi que le Centre d’addictologie du bassin d’Arcachon a inauguré ses nouveaux locaux sur l’esplanade de la gare à Arcachon (1). Une ville que l’antenne gérée par le comité d’étude et d’information sur la drogue et les addictions (CEID) a investie il y a déjà treize ans. Le point avec Jean-Michel Delile, médecin psychiatre et directeur du CEID.
« Sud Ouest ». Pourquoi et comment le centre s’est-il implanté à Arcachon ?Jean-Michel Delile. Dans les années 90, deux personnes sont mortes d’overdose. Un premier bus d’échange de seringues s’est installé sur la jetée Thiers sous l’impulsion de Didier Spinhirny (2). Le constat a vite été fait que le problème n’était pas saisonnier. Grâce au docteur Fauquet, le centre a pu ouvrir dans les locaux de la Croix Rouge avec l’aide de la Cobas.
Quel public accueilliez-vous en 2001 ?Des héroïnomanes, des cocaïnomanes. Des gens qui avaient des problèmes à l’année, beaucoup issus du monde de la mer. Au début, nous avions une vingtaine de personnes. À présent, nous recevons 200 réguliers et le chiffre peut monter jusqu’à 400. Et nous gérons tout type d’addiction : drogue, alcool, jeu, alimentation…
Est-ce pour cela que vous avez eu besoin de locaux plus spacieux ?Oui. Le déménagement du service d’aide à domicile nous a permis de venir ici. Le dialogue avait été engagé lorsque Jean-Jacques Eroles présidait la Cobas. Nous nous connaissions, car en tant que pharmacien, il a été l’un des premiers à accepter de délivrer de la méthadone.
Qu’est-ce qui pousse les gens à franchir la porte du centre et qu’est-ce qui les en empêche ?La moitié vient spontanément ou sur l’encouragement d’un proche. Les autres sont orientés par les services sociaux ou les médecins. La réglementation fait que les consultations sont anonymes et gratuites. Cela lève déjà des barrages. En revanche, beaucoup ont peur d’être jugés ou se disent tout simplement que décrocher est une affaire de volonté. Or c’est faux. À un moment donné, la volonté ne suffit plus. Si l’on est vraiment dépendant, malade, il faut accepter de se faire aider.
Quels profils se côtoient dans la salle d’attente ?Tous les profils : des retraités aisés qui ont tout perdu au jeu aux jeunes marginaux avec leurs chiens.
Combien de temps faut-il pour décrocher ?Cela dépend. Si l’on prend un jeune fumeur de cannabis qui n’est pas encore tombé dans la dépendance et qui a envie de changer cela peut prendre quelques mois, même moins. Pour quelqu’un engagé dans une addiction dure et longue cela peut se compter en années. Il faut prendre en compte tous les facteurs car avec l’addiction, il y a souvent la dépression, l’anxiété, la phobie sociale. C’est pour cela que notre équipe est composée d’un psychiatre (lui), d’une assistante sociale et de médecins. Et ce que l’on constate, c’est que l’on peut se sortir de toutes les addictions.
À partir de quel âge peut se mettre en place un processus addictif ?En moyenne à 15 ans. Ce qui signifie que la consommation, alcool, drogue ou jeux vidéo, a débuté avant. Nous intervenons dans les lycées car le gros enjeu est de précisément retarder l’addiction. Plus elle survient jeune, plus elle a de conséquences sur l’organisme.
On parle aussi d’addictions au sexe. En traitez-vous ?Cela reste marginal. Nous avons eu trois cas sur le centre.
(1) Centre d’addictologie du bassin d’Arcachon : 05 56 83 11 12. Du lundi au vendredi de 9 h à 13 h et de 14 h à 17 h, parking des Quinconces sur l’esplanade de la gare à Arcachon. (2) Du réseau BASTHA : Bassin d’Arcachon, Sida, toxicomanies, hépatites, addictions.