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28 octobre 2020

La promotion de la légalisation du cannabis “fait le buzz” et ruine les faibles effets d’une prévention déficiente

La promotion de la légalisation du cannabis “fait le buzz” et ruine les faibles effets d’une prévention déficiente

Par Jean Costentin, Professeur émérite de la faculté de Médecine & Pharmacie de Rouen, Président du centre national de prévention, d’études et de recherches sur les toxicomanies

Le maire de Reims, Mr. A. Robinet, membre d’un parti (le LR) que l’on croyait opposé à la légalisation du cannabis, nous donne à penser le contraire. Pour appuyer ses déclarations en faveur de la légalisation de cette drogue et pour l’expérimentation qu’il voudrait effectuer dans sa ville, il est présenté par le président de l’Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie (ANPAA), dans une émission de la chaine Cnews (17-IX, 21h), comme psychiatre, ce qu’il n’est pas !

Il est pharmacologue, ce qui n’implique pas qu’il soit médecin ou pharmacien. Les vingt publications scientifiques qu’il a cosignées, identifiant ses recherches n’ont rien à voir avec le cerveau ou les toxicomanies. Ainsi, sa déclaration sur la légalisation du cannabis ne repose que sur des convictions, dénuées d’une réelle expertise.

Nous présentons ici des données sanitaires, pour l’inciter à élargir ses informations sur ce sujet dont il s’empare avec fracas.

La prohibition édictée par la loi de 1970 pressentait les divers méfaits du cannabis. Les 50 ans qui ont suivi les ont largement vérifiés, précisés, et en ont ajouté d’autres, que nous énumérons maintenant.

Une toxicité psychique : – avec une ivresse ; des perturbations des réflexes, de l’équilibre, des perceptions, à l’origine d’accidents routiers et professionnels, majorés par leur rencontre avec l’alcool. Le risque d’être responsable d’un accident mortel est multiplié par 14 à 29 selon les études, en cas de consommation conjointe d’alcool et de cannabis (champagne ou cannabis, il faudra choisir). Un sujet sur quatre tué dans un accident de la circulation routière présente un test positif aux stupéfiants (cannabis le plus souvent) avec une désinhibition, qui libère des pulsions auto – ou hétéro – agressives.

• avec des perturbations de la faculté d’apprendre ; c’est la drogue de la « crétinisation » (« la fumette ça rend bête »). La France, premier consommateur en Europe, occupe le pitoyable 27ième rang du classement international PISA des performances éducatives.

• avec des interférences sur la maturation cérébrale, qui s’opère entre 12 et 22 ans ; elles sont à l’origine d’une réduction du Quotient Intellectuel et d’anomalies facilitant les troubles délirants et hallucinatoires. La responsabilité du cannabis dans l’induction, la décompensation, l’aggravation de la schizophrénie ainsi que dans la résistance opposée à ses traitements est maintenant bien établie.

• avec l’incitation à y adjoindre d’autres drogues, pour pallier la tolérance progressive à ses effets euphorisants ; d’où une escalade, aboutissant à des poly toxicomanies devenues communes.

• avec l’induction par le THC (son principal constituant) d’effets épigénétiques. Il s’agit de modifications du niveau d’expression de certains gènes, qui affectent les caractères qu’ils expriment (le phénotype). Les individus en âge de procréer qui exposent leurs gamètes (spermatozoïdes ou ovules) au THC, transmettent à leur enfant ces modifications épigénétiques. Elles pourront être à l’origine d’anomalies du spectre de l’autisme, ou de la schizophrénie, ou d’une vulnérabilité aux drogues à l’adolescence, ou d’anomalies comportementales, ou de perturbations de la cognition, ou des défenses immunitaires. Le fumeur de cannabis non seulement s’inflige les méfaits de cette drogue, mais de plus fait hériter sa progéniture de certains d’entre eux.

• avec l’induction de troubles anxieux et / ou dépressifs, pouvant comporter, en embuscade, des incitations au suicide.

Sa toxicité physique : Elle l’emporte sur celle du tabac (responsable chaque année en France de 75 000 morts).

• La combustion du cannabis produit 6 à 8 fois plus de goudrons cancérigènes, et d’oxyde de carbone (gaz très toxique) que la combustion du tabac.

• Il est cancérigène pour les testicules.

• Sa toxicité cardio-vasculaire se traduit : par des artérites des membres inférieurs ; par des accidents vasculaires cérébraux ; par des infarctus du myocarde, dont il est la troisième cause de déclenchement.

• Il déprime les défenses immunitaires.

• Trois femmes sur 4 fumant du cannabis n’arrêtent pas leur consommation quand elles deviennent enceintes (avec le seul tabac ce n’est qu’une sur 4). Il induit des effets tératogènes ; il abrège la gestation, avec la naissance d’un nourrisson plus chétif que le ferait une simple prématurité ; plus à risque de mort subite ; présentant un ralentissement de son développement psychomoteur ; une plus fréquente hyperactivité avec déficit de l’attention et, à l’adolescence, une grande augmentation de sa vulnérabilité aux toxicomanies.

Sa toxicité sociale.

La France est en Europe son tout premier consommateur (1.500.000 « usagers réguliers » dont 900.000 usagers quotidiens et multi-quotidiens). Cette consommation débute désormais au Collège ; faisant appel à des résines dont le taux de THC a été multiplié par 6 en 30 ans, et plus récemment à de nouveaux produits encore plus fortement dosés (telle la BHO = butane hash oil, contenant 70 à 80 % de THC), mais aussi à de nouveaux modes de consommation (pipes à eau, e-cigarettes avec des recharges « d’huile de cannabis » …) qui augmentent la cession du THC à l’organisme.

D’aucuns font miroiter de la légalisation d’importants revenus pour le budget de l’Etat. Une étude vient de calculer que pour 1 $ collecté par l’Etat du Colorado, il doit assumer 4,5 $ de charges liées aux conséquences néfastes de sa consommation.

D’autres (ou les mêmes) prétendent que la légalisation fera disparaître la pègre bénéficiant de cette drogue. Le cannabis « de régie » devrait être cher, pour être dissuasif, et faiblement dosé en THC, pour être moins toxique ; alors les dealers vendront moins cher un cannabis plus « puissant » et/ou vendront d’autres drogues, que dans la même logique il faudra légaliser. Au Canada, 2 ans après sa légalisation, le marché noir reste dominant (60 à 80 % du marché), vendant une drogue moins chère et plus fortement dosée en THC.

Un message déplorable en direction de la jeunesse.

Le message démissionnaire de Mr Robinet, est incompréhensible venant d’un universitaire et d’un édile.

Comment interrompra-t-il son « expérience », si elle s’avère catastrophique ? Le « char de l’Etat » n’ayant pas de marche-arrière.

Parmi ceux qui ne fument pas de cannabis, 60 % déclarent que c’est en raison de sa toxicité et les autres que c’est en raison de son interdiction. Que deviendrait leur bonne résolution si cette drogue était légalisée ? Le nombre des consommateurs pourrait s’envoler, vers les 13 millions de tabagiques ou les 4 à 5 millions d’alcoolo-dépendants.

Comment croire que le cannabis est dangereux, si l’Etat, par nature protecteur, décidait qu’il n’est plus interdit d’en fumer ? Voilà comment une prévention, déjà foncièrement déficitaire, serait complètement ruinée.

Le tabac est la première cause de mortalité évitable, comment le combattre, si dans le même temps on autorise le cannabis ? ■

L’auteur de cet article tient à la disposition de l’édile ayant exprimé, urbi et orbi, la proposition d’expérimenter dans sa ville la légalisation du cannabis, les références bibliographiques justifiant chaque élément de son argumentaire.

Il le conjure, pour sa réputation, pour les responsabilités qui lui sont confiées, pour sa postérité, pour sa ville, pour la Nation et pour la jeune génération, de ne pas persévérer dans son erreur.

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Les jeunes, un public à protéger face aux drogues

Par François Benito -28 octobre 2020,

Le risque d’overdose est plus important lors d’utilisation de drogues de synthèse. (Photo DR)

Une semaine de prévention des addictions chez les jeunes se tient jusqu’au 31 octobre. Elle cible un public particulièrement vulnérable aux conduites addictives et qui est désormais exposé à l’irruption des drogues de synthèse sur l’île.

« Si on fait de la prévention à l’adolescence, c’est déjà tard. Plus on commence les drogues tôt, plus il y a de chances que les addictions s’installent. » L’addictologue David Mete pose un constat lucide sur la nécessité de prévenir précocement les comportements à risque en matière d’addictions. Une nécessité qui va s’incarner jusqu’au 31 octobre via la tenue d’une semaine de prévention en direction du jeune public, organisée par la FRAR (Fédération Régionale Addictologie Réunion) et les Maillons de l’espoir, dont le mot d’ordre est « Choisis ta voie ! «

Loin d’être un phénomène mineur, l’addiction concerne un nombre croissant d’adolescents et préadolescents réunionnais. D’après l’Observatoire Régional de la Santé (ORS), 8 jeunes sur 10 ont déjà essayé l’alcool à 17 ans et 1 sur 3 a consommé une forte quantité d’alcool. « Il y a trois types de public, détaille David Mete. Ceux qui n’ont jamais consommé, ceux qui ont déjà testé et ceux qui ont une addiction. Ce qui nous inquiète actuellement, c’est que la société est de plus en plus addictogène. »

Une situation qui se manifeste tant dans la dépendance accrue aux écrans que dans l’irruption de nouvelles drogues de synthèse désormais disponibles pour le grand public. Autrefois cantonnées à des consommateurs initiés et rares, la MDMA, l’ecstasy et même l’héroïne sont de plus en plus présentes sur l’île. « La fréquence de consommation des produits augmente sur l’île. Il y a des passeurs et des mules qui sont régulièrement arrêtés. Il faut une mobilisation pour éviter que des réseaux mafieux ne s’implantent sur l’île et que ces nouvelles drogues ne s’implantent durablement. »

Un enjeu de santé publique

Cet enjeu est de taille tant les conséquences d’addictions à ces drogues de synthèse pourraient avoir des conséquences néfastes. Si jusqu’à présent les overdoses mortelles sont relativement rares à La Réunion, elles pourraient se multiplier au vu de la dangerosité et de l’imprévisibilité de ces substances chimiques. Au vu du contexte anxiogène qui règne actuellement à cause du covid, et d’un environnement socio-économique réunionnais marqué par un chômage persistant et endémique, ces risques ne sont pas à sous-estimer.

Pour parvenir à les endiguer, l’une des solutions reste une prévention plus active. Une prévention dans le domaine de la santé publique autour de laquelle les moyens doivent être accentués pour la rendre bien plus efficace. « La prévention a toujours été le parent pauvre de la médecine en France.Le dispositif de santé se concentre sur le soin. Il faut déployer bien plus de moyens pour rendre cette prévention aux addictions visible à l’ensemble de la population. »

En attendant que ces moyens se débloquent, la semaine de prévention des addictions chez les jeunes Réunionnais va mener plusieurs actions de sensibilisation tant sur les réseaux sociaux qu’aux abords des établissements scolaires aux quatre coins de l’île. Des actions qui semblent indispensables tant les conduites addictives sont lourdes de conséquences si elles s’installent durablement.

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