Alors que maires et parlementaires Les Républicains s’opposent sur la question, certains membres du gouvernement rappellent que la légalisation du cannabis n’est pas à l’ordre du jour.
Dimanche 27 septembre, trois maires LR avaient publié une tribune dans le JDD où ils appelaient à la légalisation du cannabis. Une semaine plus tard, 80 parlementaires LR ont réfuté cette idée en publiant, eux aussi, un texte dans le même journal. Finalement, certains membres du gouvernement se sont positionnés contre cette idée lors de plusieurs interviews.
Sur le plateau de LCP lundi 5 octobre, Marlène Schiappa, ministre déléguée à la Citoyenneté a déclaré :
Je suis contre la légalisation du cannabis. Pourquoi ? Parce que généralement ça mène à la consommation de drogues plus dures et qu’on sait que ça sert à financer les réseaux de traite des êtres humains et d’ailleurs en partie les activités terroristes qu’on évoquait.
Position similaire pour Eric Dupond-Moretti, le ministre de la Justice, au cours d’un entretien publié par Le Figaro ce mardi 6 octobre : « Le cannabis déscolarise, rend dépendant psychologiquement, et a des effets délétères sur la santé mentale et physique. J’ai donc toujours été opposé à sa dépénalisation […] Je pense que cela ne fera que déplacer la délinquance vers d’autres drogues comme la cocaïne et l’héroïne. »
A la mi-septembre, Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur avait déjà fait part de son rejet de la légalisation du cannabis : « Je ne peux pas, en tant que ministre de l’Intérieur, en tant qu’homme politique, dire à des parents qui se battent pour que leurs enfants sortent de l’addiction à la drogue, que l’on va légaliser cette merde. Et je dis bien ‘cette merde.’ «
Il apparaît très clairement que le gouvernement est encore loin d’envisager la légalisation de la weed. Le lancement de l’expérimentation du cannabis thérapeutique envisagé à l’origine au mois de septembre a été reporté de trois mois, pour cause de coronavirus.
Le maire de Reims, M. Robinet, membre du LR, parti jusqu’alors assimilé aux prohibitionnistes du cannabis, s’exprime en faveur de sa légalisation, proposant que sa ville soit le siège de son expérimentation. Sait-il encore où il habite, et pour son appartenance politique, et pour sa ville, cité historique, mondialement identifiée au champagne ? Deviendra-t-elle « Shit-ville » ou « Joint-ville » (sans pont) !
M. Robinet, ni psychiatre, ni médecin, ni pharmacien (contrairement à ce que voudraient faire accroire ceux qui appuient sa proposition), a fait des études scientifiques, suivies par une thèse de pharmacologie, prolongée d’autres travaux, tous étrangers à la neurobiologie et aux toxicomanies. Son adhésion à la légalisation du cannabis repose donc sur des convictions, dénuées de compétences.
La loi de 1970 prohibant le cannabis pressentait les méfaits à cette drogue ; les cinquante ans qui l’ont suivie les ont précisés, en y ajoutant d’autres encore plus graves.
Une toxicité psychique majeure : ivresse à l’origine d’accidents routiers et professionnels, majorée par l’association à l’alcool (champagne ou cannabis, il faudra choisir) ; effets désinhibiteurs libérant des pulsions agressives (rixes, viols…) ; « crétinisation » (« la fumette / ça rend bête ; le chichon / ça rend con », « pétard du soir / trou de mémoire ») ; démotivation (« pétard du matin / poil dans la main ») ; induction d’anxiété et de dépressions, pouvant mener au suicide ; perturbation de la maturation cérébrale (entre 12 et 20 ans), avec diminution du quotient intellectuel et émergence possible de la schizophrénie (« la folie ») ; incitation à consommer d’autres drogues conduisant aux polytoxicomanies. Induction, par son tétrahydrocannabinol, d’effets épigénétiques qui modifient le niveau d’expression de certains gènes, affectant les caractères qu’ils expriment (le phénotype). Les individus en âge de procréer qui exposent leurs spermatozoïdes ou leurs ovules au THC transmettent à leur enfant ces modifications, qui peuvent être à l’origine de troubles autistiques, de la schizophrénie, d’une attirance vive pour les drogues qui s’exprimera à l’adolescence… Le fumeur de cannabis non seulement s’inflige divers méfaits, mais fait hériter sa progéniture de divers autres.
Sa toxicité physique l’emporte sur celle du tabac (qui tue, chaque année, 75.000 Français). Citons les cancers, les accidents vasculaires cérébraux, les infarctus du myocarde (3e cause)… Les femmes enceintes fumant du cannabis exposent leur enfant à des risques tératogènes, de mort subite, de ralentissement de leur développement psychomoteur, d’hyperactivité avec déficit de l’attention, d’une grande vulnérabilité aux toxicomanies…
La France est, en Europe, le premier consommateur de cannabis (1.500.000 « usagers réguliers ») ; sa consommation débute désormais au collège, usant de produits aux taux de THC multipliés par six en trente ans, avec de nouveaux modes de consommation (pipes à eau, e-cigarettes avec des recharges « d’huile de cannabis »…) qui augmentent sa cession à l’organisme.
Oubliez les revenus que sa légalisation apporterait au budget ; pour 1 dollar collecté, l’État du Colorado doit débourser 4,5 dollars pour assumer les conséquences néfastes de sa consommation.
Oubliez la disparition de la pègre que réaliserait la légalisation. Le cannabis légalisé serait cher pour être dissuasif et faiblement dosé en THC pour être moins toxique ; les dealers vendraient moins cher un cannabis plus « puissant » ; ils y ajouteraient la vente d’autres drogues que, dans la même logique, il faudrait légaliser.
Les jeunes qui s’abstiennent du cannabis le font, pour 60 % d’entre eux, par crainte de sa toxicité, et pour les 40 % restants, par respect de son interdiction. Leurs bonnes résolutions seraient ruinées si cette drogue était légalisée. Comment continuer de croire que le cannabis est dangereux si l’État, protecteur par destination, levait son interdiction ? Le nombre des consommateurs tendrait alors vers les 4 à 5 millions d’alcoolo-dépendants et même les 13 millions de tabagiques.
Voilà comment, Monsieur le Maire, une prévention foncièrement déficitaire serait complètement annihilée. Je vous conjure, pour vos responsabilités, pour la nation et pour notre jeune génération, de ne pas persévérer dans cette erreur.
La tribune publiée dans le « Journal du dimanche », et soutenue notamment par Bruno Retailleau et Eric Ciotti, se veut une réponse à celle de trois maires du même parti Les Républicains qui réclamaient la légalisation du cannabis.
« Il n’y a pas de “drogue douce”. La drogue est un poison, un fléau que nous devons combattre ! », estiment 80 élus du parti Les Républicains (LR) et apparentés, qui s’opposent à la légalisation du cannabis, dans une tribune publiée par le Journal du dimanchedu 4 octobre.
« Ces dernières semaines, certains maires ont relancé le débat en se prononçant pour la légalisation de la consommation du cannabis. Nous, députés et sénateurs Les Républicains, voulons rappeler que nous y sommes fermement opposés », écrivent ces élus dont Bruno Retailleau, patron du groupe LR au Sénat, Eric Ciotti, député des Alpes-Maritimes, Gérard Longuet, sénateur de la Meuse, ou encore Philippe Bas, sénateur de la Manche.
Cette tribune est une réponse à celle de trois maires du même parti LR qui avaient réclamé la semaine dernière, dans le JDD, la légalisation de la consommation de cannabis, qu’ils estiment être « le meilleur moyen d’en anéantir le trafic et de ruiner les trafiquants ».
En outre, « ce n’est pas parce que les forces de l’ordre ont du mal à venir à bout du trafic qu’il faut légaliser la pratique ! », insistent les parlementaires, « sinon il faudrait aussi légaliser le trafic d’armes, la fraude fiscale, la prostitution et ne plus sanctionner les vitesses excessives au volant ! ».
« Nous voyons dans nos circonscriptions des parents accablés de voir leur enfant dépendant, et des familles détruites », « des amitiés disparaître à cause de la consommation de drogue, des gens perdre leur emploi et des jeunes tomber dans la délinquance pour se fournir en cannabis », insistent-ils, voyant là la cause de « psychose, schizophrénie, dépression, échec scolaire, déscolarisation, désocialisation… ».
« Nous partageons les mots du ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin : “La drogue, c’est de la merde !” » M. Darmanin avait indiqué à la mi-septembre qu’il ne pouvait pas, « en tant que ministre de l’intérieur, en tant qu’homme politique, dire à des parents qui se battent pour que leurs enfants sortent de l’addiction à la drogue, que l’on va légaliser cette merde. Et je dis bien “cette merde” ».
Enfin, « même si le cannabis restait théoriquement interdit aux mineurs, on sait que les enfants qui auront vu leurs parents se droguer seront aussi des consommateurs, comme on le constate déjà pour le tabac… », préviennent encore les élus.
Messages d’information conçus par la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA), pour comprendre les risques du cannabis (septembre 2020).
Il s’agit de messages très clairs et parfaitement ciblés, combattant les idées reçues et expliquant les dangers essentiels de cette drogue.
Interrogés sur la représentation qu’ils ont des drogues, les adolescents attribuent volontiers au cannabis une image positive et dédramatisée, opposée aux effets négatifs qu’ils associent au tabac. Décrit comme « plaisant », « convivial », voire « naturel », le cannabis est aussi perçu comme moins dangereux et addictif que la nicotine, cité comme « un produit qui ne fait pas de mal ».
Pourtant, les preuves scientifiques s’accumulent sur les risques pour la santé liés à l’usage de cannabis. Les jeunes, dont le cerveau est en maturation jusqu’à 25 ans environ, sont particulièrement concernés. L’impact se mesure en termes de santé physique et psychique mais aussi de réussite scolaire et d’insertion sociale et professionnelle.
Lutter contre la banalisation du cannabis est donc indispensable. D’autant que le produit est largement diffusé dans la société française : 900 000 personnes consomment du cannabis tous les jours ; en 2017, 45% des adultes entre 18 et 64 ans déclarent avoir déjà expérimenté ce produit au cours de leur vie.
Quant aux adolescents de 17 ans, près de 4 sur 10 ont déjà fumé du cannabis au moins une fois ; l’usage régulier, au moins dix fois durant le mois, concerne 7% d’entre eux. La consommation de cannabis par les jeunes de 17 ans est néanmoins en baisse marquée depuis 2014, quel que soit l’indicateur examiné : expérimentation, usage dans l’année ou usage régulier.
C’est pour prolonger cette tendance ainsi que pour informer la population française, à distance des idées reçues et des intérêts économiques, que la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives diffusera jusqu’à début octobre des messages courts et simples, destinés à mettre en évidence les risques pour la santé liés à l’usage de cannabis. Ces messages s’adressent aux adolescents, jeunes adultes, parents, usagers occasionnels ou réguliers ainsi qu’à tout citoyen souhaitant être informé sur le sujet.
Ces 20 messages seront diffusés du lundi 14 septembre au vendredi 2 octobre, sur tous les réseaux sociaux de la MILDECA :
Le cerveau des jeunes est particulièrement vulnérable au cannabis : La maturation du cerveau, jusqu’à environ 25 ans, peut être affectée par l’usage de substances psychoactives
La consommation régulière et précoce de cannabis altère le bon développement du cerveau
Le cerveau des jeunes est particulièrement vulnérable au cannabis : En cas de consommation régulière peuvent apparaitre des troubles : de l’attention, de la mémoire à court terme, de la faculté de prendre des décisions, du temps de réaction
Le cannabis, une drogue pas si douce que ça…Le tabac étant majoritairement associé au cannabis, le fumeur s’expose à des risques de cancer liés au tabagisme : bouche, larynx, œsophage, vessie, poumon, etc. La fumée issue du mélange cannabis et tabac contient plus de substances cancérigènes que la seule fumée du tabac
Le cannabis, une drogue pas si douce que ça…Le cannabis est issu d’une plante « naturelle », il n’en est pas moins nocif pour la santé. Quelle que soit sa forme, le cannabis peut être coupé avec des substances dangereuses : henné, cirage, pneu, huile de vidange, plomb, plastique, etc.
Le cannabis, une drogue pas si douce que ça…Problèmes scolaires, familiaux ou personnels, souffrance… peuvent conduire à consommer pour mettre les soucis à distance, mais parfois le cannabis amplifie le mal-être avec : une perte de motivation (études, loisirs, travail), un isolement accru (amis, famille)
Des risques psychiques. Une consommation régulière et prolongée chez l’adolescent n’ayant pas de problème pré-existant, pourra entrainer au cours de sa vie : des troubles dépressifs, des risques de comportements suicidaires
Des risques psychiques. Dans certains cas, la consommation de cannabis peut : provoquer une «psychose cannabique», révéler ou aggraver les symptômes de la schizophrénie ; qui se caractérisent toutes deux par des hallucinations et/ou des idées délirantes. Ces symptômes ne doivent pas être pris à la légère et nécessitent rapidement une prise en charge médicale
Des risques psychiques. Le «bad trip» ou «intoxication aiguë» au cannabis peut arriver dès la première prise. Il se manifeste par un malaise physique et/ou psychique : tremblements, difficultés à respirer, perceptions altérées, peur de mourir, angoisses, palpitations. Evitez de consommer seul(e). En cas d’urgence, faites le 15.
Des risques pour la famille. Consommé par une femme enceinte, le cannabis expose à des risques immédiats… : fausse-couche, naissance prématurée, faible poids à la naissance… et bien au-delà de la période de la grossesse, de possibles perturbations de la maturation cérébrale.
Des risques pour la famille. A la maison, attention : à l’inhalation passive de la fumée, du cannabis, plus toxique encore que celle du tabac, aux risques d’ingestion accidentelle par les enfants en bas-âge. Des adolescents dont les parents fument du cannabis sont plus susceptibles de consommer eux-mêmes des substances psychoactives
La dépendance, ça existe ! Tous les consommateurs de cannabis ne deviendront pas dépendants, mais si … : des difficultés à diminuer ou à arrêter avec des symptômes de manque apparaissent, la vie quotidienne s’organise autour du produit (recherche, achat, temps de consommation, etc.) …la dépendance est installée
La dépendance, ça existe ! En cas d’arrêt ou de diminution, des symptômes de manque peuvent apparaitre : stress accru, irritabilité incontrôlable, difficulté à s’endormir, mal-être et/ou état dépressif durables. De l’aide sur drogues-info-service au 0 800 23 13 13
Quels impacts sur la scolarité ? Chez les jeunes, la consommation de cannabis diminue les capacités : de mémoire immédiate, de concentration, d’attention, de vigilance…pouvant entrainer de sérieuses difficultés scolaires, et donc, une perte de chances pour l’avenir
Quels impacts sur le travail ? La consommation de cannabis (au moins 1 fois/mois) peut multiplier jusqu’à 3 le risque de perdre son emploi dans l’année. Le risque est le même quel que soit le sexe, l’âge et la catégorie socio-professionnelle. Plus la consommation est importante, plus le risque est élevé. Source : CONSTANCES, cohorte épidémiologique
Quels impacts sur la conduite ? Consommer du cannabis multiplie par 1,65 le risque d’accident mortel de la route. Ce risque est multiplié par 29 si de l’alcool est consommé en même temps. En cas d’accident, les réparations du véhicule ne seront pas prises en charge par l’assurance
Quels impacts sur la conduite ? Consommer du cannabis altère : les réflexes et le temps de réaction, le contrôle de trajectoire, la coordination des mouvements, l’audition et la vision. Les effets pouvant durer jusqu’à 10 heures : ne conduisez pas, ne laissez pas vos amis conduire s’ils ont fumé
Réduire les risques en cas de consommation. Mieux vaut ne pas fumer mais dans le cas contraire, consommez de préférence : avec des personnes de confiance, dans un environnement rassurant. Evitez de fumer si vous ne vous sentez pas bien (fatigue, stress, …) et attendez de bien connaitre les effets sur vous avant de consommer plus ou plus souvent. Consommer expose à des risques, en cas d’urgence, faites le 15
près de 6 000 PV ont été dressés en un mois en France
Les gendarmes et les policiers sanctionnent chaque plus de 200 usagers de cannabis sur la voie publique, dont une grosse part en région parisienne
Un plant de cannabis, en Catalogne, le 24 septembre 2020. (JOSEP LAGO / AFP)
Près de 6 000 amendes pour usage de stupéfiants ont été dressées en France depuis sa généralisation par le gouvernement début septembre, a appris franceinfo auprès du ministère de l’Intérieur, confirmant une information du Figaro. En un mois, près de 6.000 procès-verbaux électroniques ont été adressés à des usagers de cannabis, après qu’ils aient été surpris dans la rue par les forces de l’ordre.
Chaque jour, les gendarmes et les policiers sanctionnent plus de 200 usagers de cannabis sur la voie publique, dont une grosse part en région parisienne. Le ministère de l’Intérieur estime que ce sont « des débuts encourageants » même si le bilan peut sembler modeste et ne dessine pas encore une politique, rapporté aux grands bassins de population et aux grandes villes où le ministère veut mettre la pression sur les consommateurs.
60% en Seine Saint-Denis
C’est dans la région Île-de-France où le plus de PV ont été dressés. Près de 1 000 dont 60% en Seine Saint-Denis. Un chiffre qui illustre à lui seul, que les instructions et les priorités données aux forces de l’ordre varient d’un territoire à l’autre. Les gendarmes et les policiers ont peut-être plus de pression et de demandes de résultats dans les quartiers sensibles que dans les quartiers moins populaires où l’usage de stupéfiants est pourtant le même.
La politique du chiffre dessine aussi la carte de ces nouveaux PV anti-stups qui génèrent, on le rappelle, de l’argent pour l’État. 150 euros à 250 euros par contravention, ce qui n’est pas négligeable.