Alors que le débat sur la légalisation du cannabis est régulièrement relancé un article du Monde, publié
ce 25 décembre, titre : (« Dans la police, un débat à bas bruit sur la dépénalisation des drogues »)
Le professeur Costentin vous propose un quiz à faire en famille.
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Ce film de fiction présente le basculement d’un bon élève dans la toxicomanie (cannabis).
Il est suivi par des développements explicatifs du Pr. Jean Costentin sur les méfaits de cette drogue, en
direction, séparément, des adolescents, de leurs parents et enfin, plus largement, d’un vaste public.
Ce film est né de la rencontre, à la faveur d’une de ses conférences sur les drogues et
toxicomanies, de J. Costentin, avec le professeur Jean-Claude Guézennec qui avait été, 60 ans
auparavant, son professeur de Français et de Littérature, au Lycée Corneille de Rouen.
Le professeur Guézennec, agrégé de lettres classiques, passionné de cinéma, est à l’origine
de l’option « Cinéma » du baccalauréat. Il a créé, il y a près de 50 ans, « Archimède films ». Il a conçu
cette association, sans but lucratif, pour former des jeunes aux métiers de l’audio-visuel, en les
associant à la réalisation de films ayant pour finalité de contribuer à de grandes causes sociétales,
souvent en appui d’actions développées par la Gendarmerie nationale. Il s’agit par exemple de la
prévention contre la radicalisation ; de la prévention des accidents de la voie publique ; des actions
contre les violences faites aux femmes, etc…
Sensible aux messages portés par les livres et conférences de son ancien élève (J. Costentin),
le professeur Guézennec a voulu contribuer à leur diffusion. Au pays dont la jeunesse est
spécialement affectée par le cannabis, puisque la France est le tout premier consommateur de cette
drogue parmi les 27 Etats membres de l’Union Européenne, il a voulu, sur ce sujet aussi, faire œuvre
de salubrité publique.
Le cannabidiol (CBD) ; résumé de quelques connaissances
Pr. Jean Costentin – neurobiologiste, pharmacologue,
Membre de l’académie nationale de médecine.
Le THC est le principe psychotrope addictif majeur du cannabis. Malgré son statut illicite, il est consommé de façon régulière par 1.500.000 de nos concitoyens, faisant de notre Nation sa toute première consommatrice en Europe.
Ses méfaits multiples et souvent graves l’ont déconsidéré auprès de la majorité de nos concitoyens. Néanmoins, pour conquérir leur clientèle et rentabiliser les nombreuses serres qui devaient le produire, à des fins hâtivement qualifiées de «thérapeutiques » mais aussi scandaleusement de « récréatives », un composé voisin, le cannabidiol / CBD a été mis en exergue. Ce CBD, présent en abondance variable dans le chanvre indien selon ses cultivars, est le métabolite immédiat du cannabigérol/CBG, le précurseur immédiat du tétrahydrocannabinol/THC. Il est quantitativement le deuxième des cannabinoïdes du cannabis ; certains cultivars ont été sélectionnés pour leur production de CBD qui l’emporte sur cette du THC.
La publicité très intense du CBD s’est d’abord appliquée à le démarquer du THC, en lui déniant tout caractère psychotrope. Néanmoins, bien vite, afin d’élargir ses indications, diverses activités de ce type lui ont été imparties.
Des études, souvent très partielles, lui décrivent des effets analgésiques (modestes), antiépileptiques (dans les syndrome de Dravet et de Lennox-Gastaut, qui sont des formes graves d’épilepsie infantile), anxiolytiques et même antipsychotiques. Avec beaucoup plus d’enthousiasme que de preuves expérimentales lui sont décrits des effets : anti-stress, anti-insomnie, anti-dépresseur, anti-émétique, anti-inflammatoire, anti-oxydant, anti-athéroscléreux, neuroprotecteur, anti-cancéreux (sein), anti-psoriasique, une stimulation du développement osseux, une action sur les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI), sur les prostatites… Cette énumération, pourtant incomplète, ne laisse d’étonner sous l’angle pharmacologique. Des laboratoires se sont jetés, à publicité déployée, dans la commercialisation d’huiles à hautes teneurs en cannabidiol.
Le CBD étant 100 fois plus hydrophile que le THC, son accès au cerveau au travers de la barrière hémato-encéphalique est moindre, tout comme sa persistance cérébrale.
Il agirait sur plusieurs cibles biologiques :
– Il n’agit pas (au moins selon les modalités usuelles) sur les récepteurs aux endocannabinoïdes, du type CB1, responsables des effets psychotropes du THC. Malgré sa faible affinité pour ceux-ci, par un mécanisme allostérique, il pourrait exercer un antagonisme des effets du THC. L’idée a été complaisamment diffusée que le CBD potentialiserait les effets utiles du THC tandis qu’il relativiserait ses effets nuisibles (sorte de miracle de la phytothérapie).
– les récepteurs D2 de la dopamine (comme agoniste partiel, à l’origine d’effets antipsychotiques, à l’instar de l’aripiprazole) ;
– certains types de récepteurs de la sérotonine (à l’origine d’effets anxiolytiques) ;
-certains types de récepteurs du glutamate (pouvant expliquer ses effets antiépileptiques)
-un effet inhibiteur de la dégradation d’une substance endocannabinoïde, l’anandamide – A.E.A., qui stimule les récepteurs CB1, sur lesquels agit le THC.
-Une étude montre qu’au contact de l’acidité extrême du suc gastrique (pH2), le CBD se transforme, pour partie au moins, en THC.
-il serait également un agoniste d’un récepteur canal, TRPV-1, (sur lequel agit la capsaïcine du piment), pouvant être impliqué dans une action anti-inflammatoire, et analgésique.
Les mécanismes d’action d’une substance sont fréquemment non univoques, mais quand on en propose un trop grand nombre, c’est qu’aucun d’eux n’est réellement patent.
Le CBD est autorisé comme médicament et commercialisé sous la dénomination d’Epidiolex® pour le traitement de certaines formes d’épilepsies infantiles (syndrome de Dravet, syndrome de Lennox-Gastaut). La commission de transparence ne lui reconnait, en association à une benzodiazépine (le clobazam), qu’une amélioration du service médical rendu d’un niveau mineur (ASMR IV).
Une autorisation de mise sur le marché a été bien antérieurement donnée à une association de THC au CBD – le Sativex®, pour le traitement des spasmes douloureux de la sclérose en plaques. Pourtant, 6 ans après avoir obtenu cette autorisation, ce Sativex n’est toujours pas disponible dans les pharmacies, (mais est néanmoins accessible, avec le statut d’autorisation temporaire d’utilisation =A.T.U.). Cette réticence est due à son ASMR, au prix élevé qu’en demande le laboratoire qui le commercialise (Almiral), au faible taux de remboursement (15%) qui lui a été accordé en relation avec cette ASMR jugée insignifiante (niveau V). Les médias l’avaient alors présenté comme une révolution thérapeutique dans le traitement des symptômes liés à une spasticité modérée à sévère due à une sclérose en plaques, culpabilisant presque les autorités d’avoir tant différé la mise à disposition de ce médicament irremplaçable à des patients dont il allait transformer la vie (effet d’une confusion très fréquente, dés qu’il s’agit du cannabis, entre la publicité, l’idéologie et la sciences pharmaco-thérapeutique).
Par voie orale le CBD, au contact du liquide gastrique, au pH très acide, se transforme en THC et en un autre dérivé, très proche mais un peu moins actif, le Δ8 tétrahydrocannabinol (M. John et coll. Identification of psychoactive degradants of cannabidiol in simulated gastric and physiological fluid. Cannabis and cannabinoid Research Vol. 1, N°1.). Cette transformation, au moins partielle, explique les effets secondaires (observés lors des études cliniques, chez 45% des utilisateurs, enfants en particulier), associant somnolence et fatigue. Cette transformation constitue une des explications à l’attrait que manifeste certain adultes pour ce « médicament ». Par contre, le recours à d’autres voies d’administration (transcutanée, fumée, résorbée par les muqueuses nasales, oro-pharyngées) ne comporteraient pas une telle transformation chez l’Homme.
S’agissant de l’effet le mieux documenté du CBD sur des épilepsies infantiles, il faut noter qu’il ne s’exprime qu’ajouté aux autres médicaments préalablement associés, pour traiter l’affection et non point isolément.
Le CBD pourrait majorer l’action de ces médicaments associés par des interactions avec leur métabolisme. Une étude s’est penchée sur ce sujet. (Kocis P et Vrana K ; Delta-9-tetrahydrocannbinol and cannabidiol drug-drug interactions, 2020, Medical Cannabis and canabinoids).
Le CBD est très lié aux protéines du plasma. Entrant en compétition avec différents médicaments qui leurs sont également très liés, il les déplace, augmentant leur fraction libre, active, et partant leurs effets ; ce qui a des conséquences pour ceux dont la marge thérapeutique est faible ; i.e. dont la dose active est proche de la dose toxique. Ainsi la cyclosporine et le tacrolimus (immunosupresseurs) ; la phénytoïne et l’acide valproïque (antiépileptiques) ; la warfarine (anticoagulant) ; la quinidine (antiarythmique) ; la lévothyroxine (hormone thyroïdienne)…
Le CBD est métabolisés par des enzymes hépatiques :
-par les cytochromes P 450 (ceux des types 1A2, 2B6 qu’il inhibe et induit, ainsi que par les cytochromes 2C8, 2C9, 2C19 qu’il induit). Ils le transforment en dérivés plus hydrophiles, ce qui diminue son accès cérébral et facilite son élimination rénale.
-puis par des enzymes, UDP-glucuronyl transférases, (UGT des types 1A9 et 2B7), qui associent les métabolites formés par les enzymes précédentes à l’acide glucuronique, en des conjugués plus faciles à éliminer par le rein dans les urines, ou par la bile dans les fèces. Ces UGT 1A9 et 2B7 sont impliquées dans l’élimination de l’acide valproïque (antiépileptique), du propofol (anesthésique général), de l’acide mycophénolique (immunosuppresseur), du digabatran (anticoagulant), avec des phénomènes de compétition.
Le CBD inhibe la glycoprotéine P (GpP) impliquée dans la résorption et l’excrétion de nombreux médicaments, il modifie ainsi leur efficacité.
Ses effets ne sont pas reliés de façon linéaire à sa concentration plasmatique, ainsi, sur l’anxiété, ils décrivent une courbe en U inversé (effet croissant avec la concentration jusqu’à une certaine valeur puis diminuant, ensuite alors que la concentration continue d’augmenter), ce qui complique les choix posologiques…
La toxicité du CBD a été étudiée chez l’animal, et plus directement chez les patients traités par l’Epidiolex®. Des troubles digestifs sont assez fréquents (nausées, vomissements, anorexie, diarrhée) avec des modifications biologiques exprimant une atteinte hépatique (augmentation des transaminases et de la gamma glutamyl transpeptidase (Huestis MA et coll. Cannabidiol adverse effects and toxicity. Curr. Neuropharmacol. 2019, 17, 974-89.
L’appréciation des intérêts éventuels du CBD est polluée par l’intrication d’un mercantilisme exacerbé, de publicités délirantes et de recherches encore très partielles, donnant lieu à des exégèses précipitées. Son innocuité est loin d’être établie, sa commercialisation est pratiquée sans contrôle ni limites, au point qu’un journal de Pontoise faisait la publicité d’une pizzeria qui en introduisait dans ses pizzas.
Le CBD se décline en une très grande variété de formes commerciales (huile, baumes, crèmes, gels, lotions, gélules, chocolats, cookies, bonbons, chewing-gum, suppositoires, recharges pour cigarettes électroniques, vaporisateurs thermiques…
Une confusion déplorable est entretenue entre médicament et produit de confort, évitant soigneusement de parler de placébo. Le CBD se trouve aussi mis au service de la banalisation du cannabis auprès d’une opinion publique largement désinformée.
Il est urgent d’instaurer de la rigueur dans l’analyse des activités potentiellement utilisables du CBD, en lui appliquant les bonnes pratiques qui prévalaient pour décider d’élever une substance à la dignité d’un médicament.
DIAPORAMA VOIR LES PHOTOS DE NICOLA SIRKIS
Nicola Sirkis (Groupe Indochine) a accordé un long entretien dans le magazine Paris Match, le jeudi 16 décembre. Le chanteur d’Indochine y aborde de nombreux sujets personnels, comme son rapport à la vieillesse. Il se confie également sur un fléau qui le touche particulièrement : la drogue. En filigrane apparaît le fantôme de son jumeau, Stéphane, décédé des conséquences de son addiction.
À 20 ans, Nicola Sirkis et Dominique Nicolas, deux amis, fondent en mai 1980 le groupe Indochine. Puis très rapidement, Stéphane, le frère jumeau du leader charismatique intègre le duo. Dès 1982, le succès est au rendez-vous avec le tube L’aventurier. Indochine s’impose dans le paysage musical pour devenir l’un des groupes pop-rock français les plus connus. À l’heure actuelle, Nicola Sirkis et ses copains sont encore dans le vent et capables de faire se déplacer les foules et remplir les stades.
Pour preuve, en pleine pandémie, après les Pays-Bas et l’Espagne, la France a organisé son premier concert test à l’Accor Arena à Paris le 29 mai dernier. Et c’est Indochine qui avait été choisi pour s’y produire devant les 5000 personnes.
Malgré le succès, une blessure reste toutefois béante chez le chanteur à la coiffure en pétard. Le 27 février 1999 restera un jour tragique dans la mémoire de Nicola Sirkis. Le membre emblématique du groupe perdait son frère jumeau Stéphane, mort des suites d’une hépatite C contractée en raison de ses addictions. Il n’avait que 39 ans. Pour Paris Match le papa de Théa, Alice-Tom et Jules s’est confié à mots couverts sur cette tragique disparition en évoquant son rapport à la drogue.
« Ça ne m’a jamais intéressé »
Nicola Sirkis l’explique très bien dans Paris Match, il n’a jamais été attiré par les paradis artificiels. « Ça ne m’a jamais intéressé », dit-il, avant de poursuivre : « Le fait de pouvoir mieux écrire dans un état second, j’ai toujours trouvé ça ridicule« . Et d’évoquer les conséquences dramatiques de ces addictions : « On les a très vite vus arriver les marchands de mort qui s’enrichissent sur la vie des plus fragiles« . Finalement, du côté de l’interprète de J’ai demandé à la lune, ne pas recourir aux stupéfiants résulte également d’un profond dégoût de se mettre dans des états seconds quels qu’ils soient. « Et puis je n’aime pas être saoul, je n’aime pas l’effet de drogue« , a-t-il confessé.
Avant de dénoncer clairement : « La cocaïne ou l’héroïne, ça ne rend sûr de soi que lorsqu’on en prend. Et si on en prend tout le temps, on meurt. Je fuis tous ces gens-là », a affirmé le chanteur. Une posture qui provient bien évidemment de son expérience personnelle et de sa douleur de ne pas avoir pu sauver son double. ’ »J’en ai plein des regrets et des remords », confiait-il à ce sujet dans Quotidien.