Publié le 31 mai 2024 à 17h30

Comment repérer les signes d’addiction chez vous ou vos proches ?
Comment repérer les signes d’addiction chez vous ou vos proches ? – © Olga Strelnikova/ iStock

SAUVEGARDER

Ma mission : informer, déstigmatiser et déculpabiliser pour libérer la parole en matière de santé mentale et d’addictions. Cette semaine, on apprend à reconnaître les signes de dépendance à l’alcool.Par Juliette Hazart

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L’alcool est la substance la plus consommée en France avec 40% d’usagers réguliers (au moins 10 fois par mois) et 10% de buveurs quotidiens ce qui représente 5 millions de personnes en France. On estime que moins de 10 % des personnes ayant une addiction à l’alcool bénéficient d’un accompagnement par un professionnel de santé. 

QU’EST SONT LES DIFFÉRENTS NIVEAUX D’USAGE DE L’ALCOOL ?

  • Vous n’avez jamais consommé d’alcool. C’est le niveau de non-usage.
  • Vous avez consommé de l’alcool au moins une fois au cours de votre vie. C’est le cas de 4 adolescents sur 5 qui ont expérimenté l’alcool à l’âge de 17 ans, selon l’enquête ESCAPAD (Enquête sur la santé et les consommations lors de l’appel de préparation à la défense) de l’OFDT (Observatoire français des drogues et des toxicomanies) menée en 2022.

La première consommation au cours de la vie, on appelle cela une expérimentation. Plus elle a lieu tôt dans la vie, dans l’enfance ou l’adolescence en particulier, plus le risque de développer une addiction à l’alcool ou à une autre substance psychoactive est augmentée à l’âge adulte. 

L’usage «simple» ou consommation modérée ou sociale, c’est quoi ? Il s’agit en quelque sorte d’une consommation « socialement réglée » ou « admise ». Elle correspond à une consommation d’alcool n’entraînant pas de complications sur la santé physique, mentale ou de répercussions sociales.

L’USAGE À RISQUE C’EST QUAND, COMBIEN, COMMENT ? 

Dans des situations spécifiques comme :

– consommer de l’alcool avant de conduire un véhicule ou une machine au travail
– consommer de l’alcool durant la grossesse
– associer l’alcool avec la prise de certains médicaments

Dans toutes ces situations, les risques de dommages existent dès la première consommation.

ENVIRON 20 % DES ADULTES DE 18 À 75 ANS DÉPASSENT LES REPÈRES DE CONSOMMATION

L’usage à risque peut être lié à la quantité. C’est boire au-delà des repères de consommation à moindre risque pour la santé. Cette valeur repère chez l’adulte, homme ou femme, est établie à 10 verres d’alcool standard par semaine, maximum, sans dépasser 2 verres standards par jour avec des jours dans la semaine sans consommation.

Après 65 ans, l’organisme tolère moins bien l’alcool et les recommandations sont adaptées par la Société française de gériatrie et de gérontologie et la Société française d’alcoologie. Pour les consommateurs quotidiens, ne pas dépasser 1 verre standard par jour et essayer d’avoir des jours dans la semaine sans consommation. Pour les consommateurs occasionnels, ne pas dépasser 2 verres par occasion, avoir au moins 2 jours sans consommation dans la semaine et ne pas dépasser 7 verres par semaine.

Environ 20 % des adultes de 18 à 75 ans dépassent les repères de consommation à moindre risque, selon les données 2021 du Baromètre de Santé publique France. 

C’EST QUOI UN REPÈRE DE CONSOMMATION À MOINDRE RISQUE ?

Les risques sont assez faibles pour être considérés comme «acceptables» pour l’individu et la société, mais pas sans risque. L’institut national du cancer rappelle que pour toute consommation d’alcool, dès le premier verre, le risque par exemple de cancer du sein augmente chez la femme et le risque de maladie cardiovasculaire augmente chez les hommes et chez les femmes.

C’est quoi un verre standard ? Il s’agit de verres basés sur le contenant servi dans un bar et non un verre maison. Une bière, un verre de whisky, un verre de vodka orange, un verre de vin servi dans les bars contiennent tous la même quantité d’alcool pur, soit environ 10 grammes. C’est ce qu’on appelle un verre standard ou unité d’alcool. Cette équivalence est valable seulement si chaque boisson est servie dans le récipient prévu à cet effet (verre à cognac, à vodka, …). À la maison, vous pouvez utiliser un gobelet doseur avec des graduations en unité d’alcoolpour quantifier votre consommation. 

LES CONSOMMATIONS À RISQUE PLUS OU MOINS ÉLEVÉ

Ne pas boire d’alcool dans certaines circonstances est l’option la plus sûre :

  • Dès le projet de grossesse, pendant toute la  durée de la grossesse et de l’allaitement.
  • Pendant l’enfance, l’adolescence et toute la période de la croissance en cas de conduite automobile ou de machine.
  • Lors de pratique de sports (du fait des risques de chute, de blessure…)
  • En cas de consommation de certains médicaments du fait du risque d’interactions avec l’alcool pouvant diminuer l’efficacité des médicaments ou en augmenter les effets indésirables.
  • Dans certaines maladies, il est également recommandé de ne pas consommer d’alcool. Demandez toujours conseil à un professionnel de santé.

L’USAGE À RISQUE PEUT ÊTRE LIÉ AUX MODALITÉS DE CONSOMMATION : C’EST COMMENT ? 

Il existe des modalités de consommation à risque qui augmentent le risque de développer une addiction au cours de sa vie :

  • La précocité de l’expérimentation, par exemple la consommation d’alcool avant l’âge de 15 ans.
  • La consommation à visée auto thérapeutique. Par exemple, consommer pour «diminuer son mal-être», «ne plus penser», «mieux dormir», «être plus détendu»… et ressentir un auto-soulagement.
  • Le cumul des consommations, les conduites d’excès avec la recherche d’ivresse et la répétition de consommations à risque. 

COMMENT REPÉRER LES SIGNES D’UNE CONSOMMATION PROBLÉMATIQUE OU D’UNE ADDICTION ?

Cela se manifeste souvent par un ensemble d’éléments. 

  • La consommation d’alcool est de plus en plus répétée, régulière. 
  • Les quantités augmentent parfois de façon insidieuse et la personne ne parvient pas à contrôler la quantité consommée bien qu’elle ait la volonté de baisser ou d’arrêter sa consommation. Elle perd le contrôle de sa consommation.
  • Elle a des envies fortes, impérieuses, de boire qu’elle ne peut réprimer qu’on appelle le craving.  
  • Il existe des conséquences dans la vie de la personne au niveau de sa santé physique ou mentale, sur le plan relationnel au travail, à la maison ou avec des amis. 

L’addiction, ça n’est pas une question de quantité ! En effet, une personne peut se sentir en difficulté avec ses consommations dont la quantité est inférieure aux seuils de consommation de moindre risque pour la santé.

QUAND PENSER À UNE ADDICTION OU À UNE CONSOMMATION PROBLÉMATIQUE ?

Devant des :

  • problèmes conjugaux, financiers, relationnels, professionnels, judiciaires…
  • des conflits ou des difficultés à assurer la journée de travail ou les tâches à la maison. Le comportement de la personne peut aussi parfois se modifier et donc la relation avec ses proches. Vous remarquez une instabilité relationnelle avec les proches, des difficultés de couples, un conflit de voisinage… La personne s’isole de plus en plus fréquemment.
  •  des absences au travail, un désinvestissement sur le plan professionnel et des loisirs
  • des troubles du sommeil, une anxiété, une dépression, de la nervosité, une irritabilité, des tremblements des extrémités, une fatigue chronique, des troubles de l’humeur
  • un état de santé plus fragile avec des consultations plus fréquentes auprès de professionnels de santé

Si vous ou l’une de vos connaissances, vous sentez en difficulté avec l’alcool, quelles que soient les quantités consommées ou la fréquence de consommation, demandez conseil à un professionnel de santé. 

La honte et la culpabilité sont des émotions souvent éprouvées par les personnes en difficulté avec leur consommation. Pourtant, l’addiction est une maladie chronique au même titre qu’une hypertension artérielle ou qu’une dépression et n’a rien à voir avec un manque de volonté ! Faire passer l’information, c’est lutter contre les idées reçues afin de libérer la parole des personnes qui sont en difficulté. 

OU TROUVER DES CONSEILS POUR ÊTRE ACCOMPAGNÉE ?

  • auprès de votre médecin généraliste
  • dans les consultations jeunes consommateurs (CJC) qui accueillent en toute confidentialité des jeunes âgés entre 12 et 25 ans en questionnement sur leur consommation, ainsi que leur entourage
  • sur le site alcool-info-service ou par téléphone pour vous ou votre entourage en toute confidentialité 7 jours sur 7 de 8h00 à 2h00 au0 980 980 930 
  • auprès de structures spécialisées comme les CSAPA(Centre de Soins, d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie), présentes dans tous les départements de France, afin de faire le point de façon anonyme et gratuite avec un professionnel sur les difficultés rencontrées
  • au sein d’une association ou d’un groupe d’entraide pour la personne concernée ou l’entourage dont vous trouverez les coordonnées sur alcool-info-service.fr