Ce credo finit par séduire la ministre de la Santé

Clamant haut et fort son opposition aux toxicomanies dont celle au cannabis, la ministre de la Santé, aussi pressée que pour l’instauration des « salles de shoots » pour toxicomanes, vient de prendre un décret (cliquez sur 2013-473 du 5 juin 2013 ; J.O. du 7-VI-2013) afin de « permettre la délivrance d’une autorisation de mise sur le marché de médicaments contenant du cannabis ou ses dérivés ».

On est tout d’abord effaré par la précipitation de sa mise en œuvre «le présent décret entre en vigueur dès le lendemain de sa publication ». On l’est aussi par le caractère approximatif de son expression, eu égard au niveau culturel affligeant des rédacteurs-conseillers de la ministre. Le cannabis est une plante (chanvre indien) ; qui n’a pas de dérivés, mais des composants. Ces composants (non précisés), dont il s’agit sans doute ici, seraient des cannabinoïdes, qui ont une structure chimique commune, à partir de laquelle ce végétal a élaboré, comme autant de variations sur ce thème chimique donné, une multitude de dérivés, aux effets biologiques des plus variés, qui sont le cas échéant contradictoires. Le principal d’entre eux, en concentration et en puissance d’effet, est le tétrahydrocannabinol (THC), qui est une drogue, un agent toxicomanogène ; mais qu’à cela ne tienne !.

Il y a deux mois environ, interrogées séparément par la ministre, sur l’opportunité du présent décret, l’Académie Nationale de Médecine, ainsi que l’Académie Nationale de Pharmacie, avaient répondu négativement et de façon argumentée. Mais les lobbies et l’idéologie, même en matière de santé publique, pèsent à cet égard beaucoup plus lourd que la science, l’épidémiologie et la pharmacologie….

L’académie de médecine avait mis en garde contre cette tentation latente, dans un communiqué qu’elle avait intitulé : « Le cannabis : un faux médicament, une vraie drogue ».

Ainsi, à l’heure où l’état de Californie ferme par centaines les dispensaires qu’elle avait laissé imprudemment s’ouvrir pour la dispensation d’un «cannabis thérapeutique», les yeux enfin ouverts sur ce subterfuge, la France se précipite avec enthousiasme dans cette aberration sanitaire. Cela survient simultanément à des menées convergentes visant à obtenir la dépénalisation / légalisation du cannabis ; cette simultanéité, dans ce contexte de précipitation, ne parait pas fortuite. Stratégie du cheval de Troie, le cannabis, déguisé en médicament, entre la tête haute dans la cité ; déjà tant sinistrée par le nombre des sujets « accros » à cette drogue : un million sept cent mille usagers réguliers, malgré son caractère illicite, faisant des français les champions européens de cette toxicomanies.

Professeur Jean Costentin

Président du Centre National de Prévention, d’Etudes et de Recherches sur les Toxicomanies (CNPERT)