Aux États-Unis, plus de trente états ont légalisé l’usage médical du cannabis, et une douzaine ont même légalisé son usage dit « récréatif », autrement dit sa consommation sans nécessité d’un « alibi » médical. Mais où cela peut-il mener ? s’interroge JAMA Psychiatry.

Pour une approche documentée de cette question, une équipe a évalué l’impact de ce changement de législation aux États-Unis sur la consommation de cannabis entre 2008 et 2016, sur des sujets âgés de 12 à plus de 26 ans. Portant sur 505 796 participants (dont 51,51 % de femmes et 77,24 % de personnes de plus de 26 ans), cette étude permet de faire les constats suivants :

Chez les jeunes de 12 à 17 ans, l’incidence des troubles liés à la consommation de cannabis (cannabis use disorders) a « augmenté de plus de 25 % » dans les états ayant libéralisé l’usage de ce produit, comparativement aux états avec une législation moins permissive : Odds Ratio OR = 1,25 ; intervalle de confiance à 95 % IC [1,01–1,55].

Chez les sujets âgés de plus de 26 ans, la consommation de cannabis a augmenté dans des proportions identiques, passant de 5,65 % à 7,10 % : OR = 1,28 ; IC [1,16–1,40].

Pour les auteurs, cette banalisation de la consommation de cannabis suscite ainsi une « préoccupation pour la santé publique. » Il paraît donc nécessaire de mieux comprendre les mécanismes et les conséquences de cette banalisation, en identifiant surtout les groupes les plus particulièrement vulnérables. La société (ici celle des U.S.A, mais plus généralement celle de tout pays) doit mettre en balance les « conséquences néfastes de la banalisation du cannabis » (notamment psychiatriques) et les « coûts sociaux bien connus associée à la prohibition », en d’autres termes les conséquences des trafics en terme de délinquance et de marché noir.

Pour les éditorialistes de JAMA Psychiatry, cette libéralisation du cannabis doit inciter les chercheurs et les décideurs politiques à explorer les leviers disponibles pour minimiser les effets sur la santé publique des adolescents et des personnes les plus vulnérables.

Dr Alain Cohen