Pr. Jean Costentin

X m’aborda triomphant ; « Vous avez vu ; ça y est, l’Allemagne va légaliser le cannabis récréatif, alors qu’on en est encore en France à ratiociner sur le cannabis thérapeutique ; c’est fou ce que l’on est ringards, au pays où tout le monde en consomme ; il serait grand temps d’ouvrir les fenêtres ».


Ce condensé de sottise me confirma dans l’impression que X, à ses heures, consommait cette drogue.


Ignoreriez vous monsieur X qu’il ne s’agit que d’une proposition de loi prônant la légalisation du cannabis, comme il en apparaît épisodiquement en France ? Vous manifestez une grande aptitude à tenir pour acquis ce qui vous arrange. Cette proposition émane du parti des verts Allemands – Die Grünen. Sachez aussi, ce que l’on ne vous a peut-être pas dit, que les autres membres de la coalition germanique au pouvoir comptent sur l’Union Européenne pour empêcher cela.


Votre cannabis « récréatif » use d’un qualificatif « très tendance » qui feint d’ignorer que la « récré » se termine souvent mal, voire même très mal. Le cannabis est responsable d’accidents de la route ou d’accidents professionnels. Drogue de la crétinisation, il brise des trajectoires qui s’annonçaient prometteuses ; il érode les ambitions ou empêche d’en avoir ; il rend des individus tout puissants sur place, ne décollant pas de leur chaise et remettant à plus tard ce qu’ils ne feront jamais.

Découvrant la médiocrité dans laquelle ils macèrent, ils augmentent leur consommation de cannabis et y ajoutent d’autres drogues pour tenter d’y échapper.
Outre sa toxicité physique, supérieure à celle du tabac (responsable de 75.000 morts chaque année), vous semblez ignorer, Mr. X, sa toxicité psychique, engendrant anxiété, dépression (avec des suicides en embuscade) ; déclenchant ou aggravant cette pathologie psychiatrique majeure qu’est la schizophrénie ; incitant au recours à d’autres drogues, dans un processus d’escalade en relation avec la tolérance qui se développe à ses effets ainsi qu’avec les modifications épigénétiques qu’il induit.


S’agissant de ces modifications épigénétiques, vous ignorez sûrement que le consommateur de cannabis, par ces modifications, peut transmettre à sa progéniture différents méfaits, tels : des malformations congénitales ; l’autisme ; une propension à développer une toxicomanie dès l’adolescence ; des déficits cognitifs ; des dépressions de l’humeur ; des dépressions de l’immunité ;
des leucémies lymphoblastiques…
Le cannabis « thérapeutique » dont vous vous gargarisez, se réfère à un des poncifs fallacieux en vogue, alors que nous manquons de preuves pour chacune des revendications thérapeutiques invoquées. Elles ne risquent pas d’être apportées par « l’expérimentation clinique » bricolée à la hâte par la mission parlementaire qui a subverti l’agence nationale de sécurité des
médicaments (ANSM) et quelques comparses souples du rachis, pour se parer d’un sérieux en fait foncièrement absent.

Cette « expérimentation » est très en deçà de l’essai clinique qui serait indispensable pour adouber le cannabis comme médicament. L’académie nationale de médecine concluait un de ses rapports sur ce sujet par : « le cannabis – un faux médicament, une vraie drogue ». La définition même d’un médicament constitue un élément d’invalidation rédhibitoire du cannabis.

Un médicament doit être une substance pure, qui développe un effet thérapeutique principal et engendre peu d’effets latéraux ; il doit présenter un rapport très favorable entres les bénéfices attendus pour le patient et les risques qu’on lui fait encourir en lui administrant. Or le cannabis est un mélange en proportions non définies d’une centaine de cannabinoïdes (hormis de deux d’entre eux, pour lesquels la concentration est précisée : le tétrahydrocannabinol / THC et le cannabidiol / CBD).

Il développe une multitude d’effets, dont plusieurs sont adverses, contribuant à un rapport bénéfices / risques très défavorable. L’objectif de cette « expérimentation » vise essentiellement à justifier le développement en France d’une filière de production du chanvre indien, afin de répondre aux besoins «thérapeutiques » puis « récréatifs » que des législateurs en folie arriveraient bien à faire valider ensuite. Ayant assisté, vraisemblablement sans vous en émouvoir, à la délocalisation de productions essentielles à notre Nation, vous voilà soucieux de l’avènement d’un « cannabis shit in France ».


La « ringardise » que manifesterait notre Nation vis à vis de la légalisation du cannabis est justifiée. Nos concitoyens ont une vive appétence pour les drogues et d’autres substances psychoactives. Ils sont parmi les premiers consommateurs européens de tabac, d’alcool, de buprénorphine/Subutex®, d’hypnotiques, d’anxiolytiques, d’antidépresseurs… Ils sont les tout premiers consommateurs de cannabis, avec 1.500.000 usagers réguliers.

Chiffre énorme, s’agissant d’une drogue prohibée, mais néanmoins pas surprenant. La loi est bafouée, étant ignorée, nul ne
s’appliquant à la justifier, à commencer par l’éducation nationale qui est à son endroit d’une « discrétion de violette sans parfum ».
Les gros nuages qui viennent des USA, où le cannabis est légalisé, font état d’une « crise des opioïdes » ayant tué 100.000 américains l’an passé ; quant aux vents qui viennent du Québec, ils nous apprennent que le cannabis est la deuxième drogue consommée après le tabac.

Ces sociétés libérales, monsieur X, se préoccupent peu de ceux qui ont versés dans le ravin des toxicomanies. Ce n’est pas le cas de notre société solidaire, qui ne peut se ruiner davantage pour les toxicomanes, abondant déjà les CSAPA, les CAARUD, les services d’addictologie et leurs équipes, les bus méthadone, la buprénorphine à haut dosage (le Subutex® et ses plus de 100.000 bénéficiaires), les hôpitaux psychiatriques embolisés par nombre de victimes des toxicomanies.

Elle doit simultanément porter secours à de nombreux autres accidentés de la vie, bien malgré eux ; c’est pourquoi elle doit tout faire pour que ne s’accroisse le nombre de ceux que les drogues précipitent dans l’incurie. Ce sont vos fenêtres, celles qui donnent sur le réel, qu’il convient d’ouvrir monsieur X.


Votre X n’a manifestement rien à voir avec la prestigieuse école Polytechnique ; sinon cela vous aurait empêché de proférer autant de sottises en si peu de mots !