Selon l’OMS, près d’un milliard de personnes vont mourir du tabagisme au cours de ce siècle. Mais à l’heure où le tabac tue 1 personne sur 8 en France, sommes-nous tous égaux face à ce fléau ? Pays, âge, sexe, années – où sont les différences ? Où se cachent les similitudes ?
L’espérance de vie dépend du genre et les inégalités en rapport avec ce dernier se sont réduites depuis les années 1980 dans la plupart des pays de l’OCDE. Les décès imputables au tabagisme chronique contribuent à ces inégalités, mais l’amplitude de ce facteur semble varier d’un pays à l’autre. Au cours des dernières décennies, il est clair que la mortalité liée à ce facteur a diminué chez l’homme pour augmenter chez la femme.
Cette évolution peut être perçue de manière directe ou indirecte.
Dans le premier cas, il s’agit de dénombrer les décès d’origine respiratoire spécifiquement liés au tabagisme et de les additionner : cancers des bronches ou des autres organes intrathoraciques, maladies respiratoires chroniques, etc.
Dans le second, l’estimation vise à inclure les autres maladies en rapport avec le tabagisme, notamment la maladie coronaire, qui sont négligées dans la première approche. Elle tient compte de l’étroite corrélation entre tabagisme et cancer bronchique et repose sur un modèle par régression établi à partir des données épidémiologiques recueillies dans 21 pays et ajustées selon l’âge et le sexe. Il est ainsi possible d’évaluer indirectement la mortalité due au tabagisme à partir de celle en rapport avec un cancer bronchique.
Un phénomène inverse chez l’homme et chez la femme
Qu’en est-il avec cette méthode indirecte en Suède entre les années 1997 et 2016 ? Les données utiles ont été extraites de toute la population des sujets de plus de 25 ans, en tenant compte des décès et du risque.
La mortalité liée au tabagisme a été évaluée à partir de celle liée aux cancers bronchiques en utilisant les coefficients du modèle précédemment défini. La contribution de ce facteur de risque aux inégalités d’espérance de vie imputables au genre a été ensuite estimée en comparant l’espérance de vie observée à celle obtenue en excluant les décès liés au tabagisme.
En 1997, l’inégalité en question a été estimée à 5 années versus 3,4 années en 2016. Elle s’est donc réduite en valeur absolue de 1,6 année, dont 0,6 année attribuable aux décès relevant du tabagisme.
En conclusion, la diminution de la mortalité liée au tabagisme chez l’homme combinée au phénomène inverse chez la femme explique en partie (40 %) la réduction des inégalités liées au genre en l’espace de trente ans (1997-2016) dans un pays comme la Suède.
Dr Philippe Telllier
Östergren O et coll. The contribution of smoking-related deaths to the gender gap in life expectancy in Sweden between 1997 and 2016. Scand J Public Health. 2019. Publication avancée en ligne le 9 mai. doi: 10.1177/1403494819848278
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