Boulevard Voltaire 12 Août 2022


Pr. Jean Costentin
Si le bélouga dans la Seine était une première, la réapparition du monstre du Loch Ness de la légalisation du cannabis au Parlement est rituelle. 31 sénateurs socialistes, dont l’ancien ministre Laurence
Rossignol, viennent de signer une tribune dans Le Monde en faveur de cette légalisation.

De puissants lobbies d’idéologues déconstructeurs, de militants pour une régression économique (EELV) et de groupes capitalistes affamés ne désarment donc pas. Leur « appel du 18 joints » dans Libé date de 1976.
Les socialistes sont à la manœuvre dans un exercice conforme à l’un de leurs stéréotypes : répondre à un
problème grave en proposant une « solution » de nature à l’aggraver. Ainsi, face à la pandémie du cannabis qui fait de notre nation la toute première consommatrice en Europe, ils proposent sa légalisation, alors que partout où elle a été instaurée, elle a accru le nombre de ses consommateurs.


Alors que la consommation de cannabis affecte, en France, 1.500.000 usagers réguliers, sa consommation débute maintenant au collège.
Alors que sa responsabilité dans l’accidentalité routière et professionnelle est avérée (majorée par
l’alcool, au point de multiplier par 27 le risque d’accident mortel).
Alors que son rôle dans la crétinisation de notre jeunesse se lit dans la dégradation du niveau du
« baccalauréat pour tous » et notre rang pitoyable (27e) au classement international PISA des performances éducatives.


Alors qu’il est irréfragable que, par un mécanisme d’escalade, il incite à la consommation d’autres
drogues, conduisant aux polytoxicomanies.
Alors que l’explosion des maladies mentales déborde les possibilités d’accueil des hôpitaux
psychiatriques, nombre de ces maladies résultant ou étant aggravées par sa consommation (anxiété, dépression, schizophrénie).
Alors qu’elle frappe nos jeunes pendant leur maturation cérébrale (12 à 22 ans) en la perturbant.
Alors que sa toxicité physique l’emporte sur celle du tabac, responsable de 75.000 décès annuels et
source de divers handicaps – le cannabis induit cancers broncho-pulmonaires, bronchites chroniques, infarctus du myocarde (3e cause de déclenchement), accidents vasculaires cérébraux, artérites des membres inférieurs, cancers du testicule…


Alors qu’au Colorado où il est légalisé, 10 % des femmes enceintes en consomment, faisant s’envoler le
nombre de malformations congénitales
(tératogénèse).
Apprenons à ces sénateurs qu’un fumeur de cannabis modifie l’expression de certains de ses gènes et qu’il transmet à sa progéniture ce marquage épigénétique, ce qui se traduit par une vulnérabilité accrue aux toxicomanies, des perturbations psychiques, une vulnérabilité à l’autisme, à la schizophrénie, aux déficiences cognitives, aux troubles dépressifs, à une dépression de l’immunité…
Qu’attendent donc de sa légalisation ces éminences sénatoriales ?

« Une meilleure protection des consommateurs » ? Comme si elles méconnaissaient les drames multiples du tabac et de l’alcool, alors qu’elles ne savent contenir ces deux drogues licites.
L’apaisement des cités « sensibles » où elles ont laissé le climat se détériorer ? Comme si elles espéraient que trafiquants et dealers se reconvertissent dans la vente du muguet.
L’abondement d’un budget (proche du redressement judiciaire) par les taxes qui seraient perçues ? Elles
semblent ainsi ignorer que les méfaits du tabac et de l’alcool coûtent deux fois plus cher à l’État qu’ils ne lui rapportent et que le bilan économique de la légalisation du cannabis au Colorado est déficitaire (accidents, violences, procès, hospitalisations pour pathologies somatiques ou psychiatriques, incurie d’un nombre croissant d’individus que la société doit assister).


Alors que prévaut, en France, une absence complète de prévention éducative sur les toxicomanies – ce
que nous reproche l’Observatoire européen des drogues et toxicomanies (OEDT) – ces sénateurs n’ont pas un mot sur l’instauration d’une éducation civique sanitaire, portant une attention privilégiée aux drogues qui minent notre jeunesse et, à terme, notre société.


Le cannabis étant porté sur les épaules du tabac, leur proposition est-elle leur réponse au président de la
République qui a fixé pour objectif national une génération sans tabac pour ceux qui auront 20 ans en 2030 ?

Jean Costentin
Docteur en médecine