Pr. Jean Costentin Président du centre national de prévention, d’études et de recherches sur les toxicomanies (CNPERT)

 L’Assemblée nationale a voté, ce vendredi 23 novembre, l’instauration d’une amende forfaitaire de 200 euros pour les « fumeurs de joints ».

L’objectif affiché était de mieux sanctionner l’usage illicite de stupéfiants qui, jusqu’alors, pouvait être passible d’une peine d’un an de prison et/ou d’une amende de 3750 euros.

Ces peines maximales pouvaient être aménagées, mais les magistrats, se sont situés presque systématiquement dans « le tout ou rien » ; ce fut leur erreur. Dans leur logique ils répugnaient (on ne les blâmera pas) à prononcer la peine maximale de prison ; quoique le sursis aurait pu participer fortement à la prévention. La valeur rédemptrice de la prison, surtout dans son fonctionnement actuel, exclut d’y recourir comme moyen de dissuasion ; certaines prisons semblent des super-discounts des drogues et, dans l’oisiveté et la désespérance qui y règnent, celui qui n’est pas consommateur de drogues très « dures » peut être converti à celles-ci.

Il suffisait au législateur qui estimait nécessaire d’agir, de demander aux magistrats d’utiliser les différentes nuances allant du non lieu à la peine maximale. Le caractère dissuasif de la loi aurait persisté sans être anéanti par son mauvais usage. La rigueur maximale n’aurait été appliquée que lorsque le deal aurait atteint les dimensions de la grande distribution. La prison systématique était évitée, mais toujours possible, le niveau de la contravention dépendant du constat d’éventuelles récidives et des ressources du contrevenant ou de ses parents. Une mémoire était constituée par le casier judiciaire ; l’infraction pouvant être effacée après cinq ans, en l’absence de récidive.

Au lieu de cela, a été instaurée une amende forfaitaire de bas niveau : 200 euros ; c’est trois fois moins que le budget mensuel tabac-cannabis d’un cannabinophile ! Cette amende ne sera bientôt perçue que comme une taxe pour abonder le budget de la Nation d’une insatiable voracité.

L’article a été adopté par les députés, lors de l’examen en première lecture du projet de réforme de la justice, avec 28 voix pour et 14 contre. On regrettera qu’un sujet de cette importance mobilise si peu de membres de la « représentation » nationale.

Par surcroît, le montant de cette amende forfaitaire est moindre que ce qui était prévu. Initialement madame Belloubet, ministre de la Justice, la prévoyait de 300 euros.  Elle avait déclaré en avril 2018 que :« Le montant de l’amende forfaitaire minorée serait de 250 euros et celui de l’amende forfaitaire majorée de 600 euros ». Les 28 députés ont suivi les préconisations du rapport des députés Poulliat (LREM) et Reda (LR), proposant une amende entre 150 et 200 euros. Souvenons nous de leurs noms, en vue de leur intégration dans le panthéon des médiocres œuvrant à la banalisation des drogues, qui prépare à leur légalisation.

Un «cannabis à point », à l’instar du permis du même nom, aurait constitué un intéressant moyen de prévention. Il aurait comporté un fichier électronique informant extemporanément celui qui verbalise du nombre de récidives dont le contrevenant est l’auteur, lui permettant de fixer le montant de la peine, voire d’enclencher une autre procédure en cas de récidives multiples tel que l’obligation de suivre un stage payant, avec contrôle des connaissances acquises, puis, le cas échéant, une injonction de soins. Au lieu de cela : une aumône au budget, non dissuasive, sans trace, sans un interrogatoire permettant de remonter les filières, sans la possibilité de rachat des incriminés qui balanceraient ceux qui font « leur blé », surfant sur la faiblesse d’autrui, par la vente de leur « herbe ».