La vraie addiction : l’argent
Les chiffres donnent le vertige. Rien qu’en octobre de cette année, 34 tonnes de cocaïne ont été interceptées par les douaniers du port d’Anvers, le plus grand site portuaire d’Europe avec ses 129 km². Pour 2021, les saisies montaient à 90 tonnes, 35 % de plus que l’année précédente et quatorze fois plus qu’en 2011, rien que pour la cocaïne qui arrive essentiellement par container des trois pays producteurs : la Colombie, la Bolivie et le Pérou, en passant par le Brésil, l’Equateur et les Antilles.
Si la production est en hausse, la demande l’est autant. D’après l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT), en 2022, avec 600 000 consommateurs (au moins occasionnels), la cocaïne est « le produit illicite le plus consommé en France après le cannabis ».
La part des 18-64 ans ayant expérimenté la cocaïne a été multipliée par quatre en deux décennies, passant au sein de la population de 1,2 % en 1995 à 5,6% en 2017.Anvers et les autres ports du nord de l’Europe, portes d’entrées de la drogue.Crédit : DW, Insight Crime Investigation.
La seule justification à cette violence est l’argent, estime un procureur.
Un kilo de cocaïne vaut 1 000 dollars au Pérou et 30 000 à Anvers. Vendu 50 euro le gramme, chaque gramme coupée trois fois en moyenne rapporte 150 euros. Ailleurs, le consommateur payera bien plus : (d’après le magazine Challenge : $533 à Riyad, $205 à Tel Aviv, $103 à Londres, et $76 à Paris).
1 kg de coke vendu 30 000 euros à Anvers par le grossiste rapporte donc (au moins) 90 000 à la vente, ce qui fait qu’une tonne peut rapporter 90 millions d’euros. Les 90 tonnes saisies en 2021, au prix d’achat de 2,7 milliards (90 x 30 millions) auraient donc pu rapporter le triple, c’est-à-dire 8,1 milliards d’euros à la vente !
A cela s’ajoute le fait que les saisies ne représentent que 12 % du volume total du transit de la place. Ce qui fait qu’au bas mot, on arrive à plus de 110 milliards d’euros de cocaïne ayant transités par le port d’Anvers, rien qu’en 2021 !
Ce grand port européen voit passer des millions de containers dont à peine 1 % est scanné, sur deux points de contrôle, de part et d’autre de l’Escaut et officiellement, libre échange oblige, pour des impératifs de rapidité et de concurrence. 70 millions d’euros ont été débloqué pour 5 scanners supplémentaires… qui se concentreront sur les cargaisons arrivant de pays à risque.
« Comment voulez-vous qu’il n’y ait pas, à certains moments cette surpuissance, qui fait que tout leur est dû et que plus rien ne leur fait peur ? », note Michel Claise.
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